de Bleu-Rouge » Mer 30 Mar 2022 09:52
L’audit financier de l'ASBH dévoilé par le maire de Béziers... pas de grandes surprises
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Fin juin 2020, Robert Ménard était loin d’imaginer qu’une société coopérative serait créée. MIDI LIBRE - L. F.
Rugby XV, Béziers, ASBH, Sport
Publié le 30/03/2022 à 11:30
L’analyse des comptes de l’ASBH, demandée par la Ville en août 2020, a enfin été dévoilée par le maire. Il confirme une gestion passée faite à la "légère" et un certain "laxisme".
Depuis des mois, il était réclamé à cor et à cri par l’opposition à la majorité municipale et une frange des supporters : l’audit sur la gestion financière de l’ASBH a enfin été dévoilé par Robert Ménard.
Le maire l’avait demandé fin août 2020, avant la création de la Société coopérative d’intérêt collectif (Scic) qui gère désormais le club : "Exactement, je l’ai remis, lundi, à 17 h 30, à Thierry Antoine (conseiller municipal EELV) qui me l’avait demandé", expliquait Robert Ménard, ce mardi matin, lors d’un entretien accordé à Midi Libre.
Un rapport de huit pages
Le document, établi par le cabinet d’audit et de conseil KPMG, est daté du 10 novembre 2020. Ce rapport de huit pages revient sur les comptes de la SASP Béziers rugby. Alors que la holding Passion d’Ovalie était l’actionnaire majoritaire du club dirigé par les co-présidents Cédric Bistué et Pierre-Olivier Valaize.
L’analyse porte sur les comptes financiers de l’ASBH entre les saisons 2017-2018 et 2019-2020. L’audit est donc dévoilé quasiment un an et demi après avoir été rendu.
Robert Ménard s’en explique : "Lors du rachat de leurs parts par la SCIC, nous avions négocié avec les anciens propriétaires du club de ne pas rendre public ce document, relève le premier magistrat. Si j’ai mis aussi longtemps à le dévoiler, c’est parce que j’avais cet engagement. Ils sont d’ailleurs au courant que nous allions le publier. Car aujourd’hui, je me retrouve avec une décision de la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada) me demandant de le remettre. Je m’exécute donc."
Un audit effectué pour une société privée peut ne pas être dévoilé. Ce n’est pas le cas pour cet audit puisqu’il a été mandaté par une municipalité.
Toutefois, comme le document donne des renseignements "commerciaux sur des entreprises privées et des contrats privés", l’essentiel des noms et des sociétés mentionnés, ont été barrés. Ils ne sont pas lisibles… Ce qui ne facilite pas vraiment la lecture et l’étude du rapport.
"Personne ne s’est mis de l’argent dans la poche"
Robert Ménard souligne que "dans cette affaire, il n’y a pas eu de gens qui ont été malhonnêtes. Les entreprises privées qui ont fait un certain nombre de choses, pris des libertés avec les règles comptables, effectué un peu de cavalerie, l’ont fait parce que les dirigeants du club le leur ont demandé."
L’édile, nouveau patron de l’ASBH par le biais de la Scic – la Ville étant devenu actionnaire majoritaire du club – insiste sur le fait que "personne ne l’a fait pour se mettre de l’argent dans la poche. Les anciens dirigeants étaient pris à la gorge et ils pensaient que c’était la seule façon pour sauver le club. Ils se sont retrouvés devant des problèmes financiers insolubles. Ils n’ont pas pu continuer à mettre de l’argent, année après année. Ils ont alors demandé à des gens de faire des choses qui, d’un point de vue comptable, ne se font pas. Ils ont géré à la légère et avec laxisme. C’est pour cela aussi que j’étais réticent à rendre public ce rapport, car une lecture superficielle du document, peut laisser croire que des gens ont fait des choses condamnables."
Quoi qu’il en soit, la DNACG, le gendarme financier de la Ligue, organe pointilleux en matière d’analyse de comptes, n’a jamais retoqué les anciens dirigeants. Ce qui confirme bien que leurs montages financiers, même bancals, tenaient la route. Du moins, entraient dans leurs critères en termes de finances : "La DNACG a toujours validé le budget, bien qu’elle sache qu’il y avait des pratiques d’équilibriste, des acrobaties budgétaires", sourit le maire. En sachant que nul ne devrait être judiciairement inquiété dans cette affaire.
Une créance de 1,85 M€ liée à la cession de la gérance des loges
Autre fait établi : en acceptant de céder le club pour 1 € symbolique, il est bien évident que dans leur ensemble, les anciens dirigeants ont perdu de l’argent. Beaucoup pour certains.
Ce rapport met aussi en évidence des créances du club : "Au 30 juin 2020, les comptes font apparaître une créance de 1,85 M€, en lien avec la cession de la gérance des loges au bénéfice" d’une entité… dont le nom n’est pas cité. La régie publicitaire, les droits à l’image, des honoraires et autres cessions d’actifs sont également pointés "comme éléments clés".
Des notes prouvent que le club biterrois ne fonctionnait pas vraiment comme les autres : "Contrairement à la moyenne des clubs de Pro D2, la principale charge d’exploitation de l’ASBH n’est pas la masse salariale, mais les services extérieurs en lien avec une externalisation de services au fil des années. Ils représentent 35,6 % des charges d’exploitation et s’élèvent à 3,20 M€ contre 1,90 M€, en moyenne, pour les autres clubs."
Sur la saison en cours, l’ASBH aura perdu 550 000 €, en sachant qu’elle traîne encore un reliquat de 600 000 € de dette. Sans cela, les comptes auraient été à l’équilibre. Robert Ménard annonce d’ailleurs que ce sera le cas la saison à venir. Et que la Ville qui a aidé le club financièrement, à hauteur de 800 000 € cette saison, en donnera autant l’année prochaine.
Réaction de Thierry Antoine : "On paie des années de pratiques opaques"
En décembre 2021, le conseiller municipal EELV Thierry Antoine s’est adressé à la Cada (Commission d’accès aux documents administratifs) dans le but d’obtenir le fameux "audit" sur les comptes de l’ASBH. "L’avis favorable a été rendu pendant les vacances de février", explique-t-il. Et le rapport lui a été communiqué par la Ville de Béziers lundi soir.
"Je l’ai parcouru rapidement, il y a des éléments biffés (pour ne nuire à personne selon les réserves d’usage émises par la Cada, NDLR). Mais quand on connaît un peu Béziers et le rugby, on comprend ce que veut dire le document…" C’est-à-dire ? "Je ne veux pas me prononcer sur le fond car on travaille dessus, on donnera un avis dans quelques jours. On a les compétences au sein du parti. Même si je n’ai pas l’impression qu’il faille énormément de compétences…"
Après des demandes répétées, finalement la découverte de ce rapport est-elle une petite victoire ? "Ce n’est pas une victoire mais un retour à la normale. Je suis content de faire en sorte que les documents soient communiqués […] Mais j’aurais préféré ne pas perdre tout ce temps."
En clair, l’élu écologiste souhaitait pouvoir se prononcer en conseil municipal de façon "éclairée". Il s’agit aussi de "contrôler l’utilisation de l’argent public" dans la mesure où la Ville verse chaque année d’importantes subventions au club et qu’il incombe au conseil municipal de les voter. Mais pas sûr que Thierry Antoine soit désormais bien avancé…
"Je n’ai pas encore étudié le dossier mais il me paraît très très léger", concède-t-il. "Tout ça pour ça. C’était un axe de la communication de la mairie, cet audit, pour montrer qu’ils s’occupaient du club… On aurait pu s’épargner beaucoup de choses. Mais je ne veux préjuger de rien car on va analyser les chiffres…"
Objectif : permettre d’améliorer les choses "dans l’intérêt de tous les Biterrois" portant le club dans leur cœur. Ce qui semble être le cas de l’élu écologiste : "Mon but n’est pas le tremplin politique", souligne-t-il. "Le rugby est très important ici, c’est un sujet qui m’intéresse, me touche. Et cette opacité, à mon avis, est l’une des raisons des difficultés du club." Il milite pour la transparence. "On paie des années de pratiques opaques", répète-t-il. Et d’interroger par ailleurs : "Combien a-t-on payé ça ?"
Réaction de Nicolas Cossange : "Je reste sur ma faim"
Nicolas Cossange (PC) fait partie des élus ayant demandé à Robert Ménard à plusieurs reprises la présentation de cet audit. Lui aussi a formulé une requête auprès de la Cada en novembre 2021 mais était toujours dans l’attente d’une réponse de la commission ce mardi lorsqu’il a appris la communication du document.
"C’était important de faire ces démarches car on ne veut pas signer de chèques en blanc", souligne-t-il. Avant d’enchaîner, sans détour, concernant ce rapport : "Je reste sur ma faim. Ce n’est pas un audit, c’est écrit dès les premières lignes. Et il ouvre pas mal de parapluies. Ils n’ont eu accès qu’aux comptes de la SASP et pas à ceux de la holding, ils n’ont pas eu non plus l’organigramme complet. Il y a des limitations terribles."
Et d’interroger : "Pourquoi on ne nous a pas transmis ce document plus tôt ? Car ça ne casse pas trois pattes à un canard." L’élu demande encore : "La Ville est-elle en possession d’autres éléments ? Sinon sur quelle base a-t-elle opéré le rachat de l’ASBH ? S’ils se sont lancés dans un montage financier sur la base de cet audit, ce sont des aventuriers…"
Le document révèle toutefois "quelques zones d’ombre" notamment autour de la régie publicitaire. "Je serais curieux de connaître la lettre de mission de départ", insiste Nicolas Cossange qui évoque, au final, un rapport "qui ne sert pas à grand-chose". "On n’a même pas une partie de la face immergée de l’iceberg."
ASB : "PATRIMOINE IMMATÉRIEL DE BÉZIERS" !
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"La plus grande gloire n'est pas de ne jamais tomber, mais de se relever à chaque fois"!